Vivre pour Mourir
Vivre pour Mourir
Je me permets l’émerveillement, sans tomber dans l’égocentrisme ni le narcissisme. Je trouve cela palpitant. Je ne m’interdis rien. Je veux vivre, vivre pour mourir sans aucun regret. Les jours deviennent une existence à eux seuls. En tout cas, je veux les vivre comme si c’était les derniers à chaque fois. Comme s’il ne m’en était accordé qu’un seul.
Et la vie prend une saveur toute autre. Les malheurs, des petits accidents de parcours. Mais surtout l’amour, me semble accessible, bien que je n’en aie pas vraiment envie après mes déboires. Un choc reste un choc. Quoi qu’on fasse. Et peu importe la manière dont on l’accuse. Humour ou pas. Détaché ou désinvolte.
Aussi, je ne veux me laisser encercler, ne veux me sentir attaché ou lié d’une quelconque manière. Pas maintenant. Pas comme ça.
Je veux tester, goûter. Je veux prendre, être conquis. Je veux me mélanger avec le plus improbable, comme pour me punir, me punir d’avoir cru si fort en l’amour. Je réfute mon côté fleur bleue en souriant.
Je veux me faire mal, en tombant de plus en plus sur des êtres écorchés et blessés. De surcroît et sans leur jeter la pierre, blessants. Je les écouter, je les écoute encore, sans ne penser une seule seconde à mes aspirations. Je ne compte pas vraiment. Ce qui est important, c’est l’autre et ce que je crois être le bonheur auquel il souhaite accéder. Cet autre débarquant dans nos vies du jour au lendemain et chamboulant tout au passage. Je leur fais de la place, éjecte même des souvenirs auxquels je tiens particulièrement et les incommodant. Je m’adapte à d’étranges spécimens, jusqu’à me fondre. Jusqu’à me perdre. Exactement comme le fit ma mère, je m’en rends compte aujourd'hui, mais j’étais incapable de le réaliser à l’époque.
Heureusement pour moi, ma forte personnalité ne peut se cacher longtemps. Elle se devine derrière mes sourires et mes plaisanteries. On me démasque à la longue, ou plutôt je ne peux détrôner ma vraie nature. Mon caractère et tout ce que cela comporte et importe, même si tout se passe délicatement. Sans brusquer, je trouve les mots… Ceux qui ne font pas trop mal. Ceux qui sont acceptables…
Mais ça ne me calme pas, et à chaque fois ça recommence. Je m’enivre de chair. N’arrive à me contenir en gouttant de plus en plus de parfums différents. Cette chair, attirante, désirable et affolante. Donnant le tournis. En voulant toujours plus. Plus forte que tout. Plus forte que l’amour. Se jouant du désir. Acculant nos fantasmes les plus déroutants et les plus fous. Défiant les limites.
Bientôt, les extrêmes s’imposent, la misère humaine me bouffe. On profite de mon oreille attentive et de ma main tendue, de ma gentillesse et de ma décontraction de la vie. De ma désinvolture et de ma dévotion. On aspire mon énergie, mais cela ne fait rien, j’en ai à revendre. On tente de casser mon sourire qui dérange souvent, mais peu importe, je ne crois pas qu’on puisse vraiment le défaire de mon visage. On épanche ses malheurs, son mal-être, son affliction, mais je résiste, j’apprends à supporter sans faillir, car je vais les chercher ces maux et tout ce mal-être. Je les attire comme des mouches. Je prends des notes. Réalise combien le malheur est universel et répandu. Je crois pouvoir souffler sur leur blessure et les soulager ne serait-ce qu’un peu. Je suis le Saint-Bernard. Le même que fut et reste toujours, ma petite mère. Je suis convaincu que je peux y arriver. Que le mal n’est pas une fatalité en soit, n’est pas incurable mais je ne réalise pas tout de suite qu’avant tout pour cela, il faut que la personne concernée le veuille. Le veuille vraiment. Il n’y a qu’elle qui peut se sortir de la panade. Qu’elle, qui à le pouvoir de vivre. De faire un pied de nez à ce fléau qui les accule, les tétanise et les paralyse.
Je me rends compte combien être bien dans ma peau, les attire. Comme un soleil. Comme une ampoule, ces papillons de nuit me foncent dessus, émerveillés et charmés. Ils se fracassent contre ma porte, toutes voiles dehors et prêts à se donner corps et âmes. Mais je n’en profite pas. Moi, ce qui m’intéresse le plus, ce qui m’émeut vraiment, ce sont ces intérieurs meurtris. Ces cœurs qui saignent et suppurent. Ces secrets et ces malaises, que l’on cache derrière un rythme de vie effrénée et délurée. Le sexe en soi est doué pour cela. Il peut dissimuler tant de douleur en nous faisant croire au bonheur, ou ce qu’on croit être le bonheur. Il nous fait croire que l’on guérit alors qu’il ne fait qu’accroître le trouble qui vit en nous.
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