Passionné
Passionné
Les années passent. Je n’ai pas vraiment croisé ce que je crois être l’amour. Tout au plus me suis-je senti très bien avec quelqu’un durant quelques temps, mais il faut être sincère, la grâce ne m’a pas touché en plein vol. Je le saurais. Je le saurais, à n’en pas douter.
Peut-être devrais-je aussi revoir mes critères. La beauté vers laquelle je suis attiré est souvent, pour ne pas dire tout le temps, compliquée. Et si je regardais au-delà de l’apparence, même si je ne suis pas dupe et le premier à dire que les formes sont tout de même importantes.
J’ai tant couru après ces traits que je voulais presque parfaits. En tout cas, pour ce que j’estimais être à mon goût le plus raffiné et le plus exigeant. Comme un cheval sauvage et fougueux, je m’emportais pour une image. Un physique, fruit de toutes les espérances, mais une fois la nuit tombée, il n’y a plus que le toucher pour prouver ce que mes yeux ont amené dans mon lit.
Je ruais aveuglément, me donnant corps et âme. Débordant sans doute, faisant peur, assurément. Outrancier, passionné, excessif à outrance, je n’ai pu qu’accumuler les passades, d’abord, charmées par cette généreuse façon de faire connaissance, puis affolées par tout ce que cela peut promettre et impliquer.
Je suis maladroit, plein de contrariétés, sans nul doute empoté dans mes prouesses, mais je me dis qu’il n’y a qu’en faisant qu’on apprend. Quitte à se laminer la figure contre des murs de béton. À se heurter à de terribles vérités. Ça ne fait rien. J’apprends. J’apprends pour ne pas mourir idiot, car je crois toujours aux sentiments. Même si j’en veux à la Terre entière de temps en temps. Même si j’ai envie de hurler de douleur par moment. Même si j’ai le poing serré dans mon dos et le regard brillant encore à bien des reprises. Même si je sens mon cœur pris dans un étau et ne peux contenir un cri de douleur lorsque ça me prend.
Ça ne fait rien. Car cela reste le seul véritable voyage que j’aie vraiment envie de faire sur cette bonne vieille planète.
Je mets de côté mes critères, même si je n’aime point parler ainsi, mais soyons francs. Je commence à m’intéresser plus au charme qu’à la beauté, et je suis surpris. Surpris à bien des égards, ne serait-ce que pour le sexe. Je réalise à quel point je faisais l’amour à un corps, non à un être tout entier. Tandis que là, c’est un tout que j’enlace, et là est toute la différence.
Le toucher prend une toute autre ampleur. Les doigts se croisent, les regards s’éternisent, les palpitations s’écoutent attentivement. Comment ai-je pu ignorer cela ? Comment ai-je pu être si puéril, même si je sais que l’éducation y est pour beaucoup. J’ai des phrases qui me reviennent. Des phrases de maman, plaignant ce bel homme ou cette belle femme vue en photo dans la rubrique nécrologique. Et les moches alors ? Ils peuvent crever tout seul ? Ils peuvent s’en aller dans la plus parfaite indifférence ?
Même si je sais que ça n’a jamais été méchant ou sectaire, ces paroles étaient dites et entendues par l’enfant que j’étais. Pourtant lorsque je regarde les photos des seventies, qu’est-ce que tout ce petit monde est laid. Tous.
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