T O U S D E S A N G E S

Les menteurs

Qu’ils soient très habiles ou de piètre novice en la matière, le fait est que les menteurs ont envahit l’humanité depuis que l’homme sait parler. Un avantage au vue de ses paires animaux mais aussi un inconvénient, car le phrasé n’est aisé pour tous, et dompter les mots pour ne pas les mettre sans cesse à notre avantage est une discipline dont nombre d’humains semblent exceller.

Mais faut-il les blâmer pour autant, tous ces menteurs, ne faisant qu’enjoliver un quotidien bien terne pour les uns, ou gonflant des aventures plutôt banales pour en faire d’incroyables histoires. Peut-on jeter la pierre au marseillais qui enjolive à sa manière, les belles choses de la vie. N’est-ce pas finalement le plus beau des moyens de se valoriser. Du moins, un peu. De se créer un monde tellement mieux que ce qu’il est vraiment.

Peut-on en vouloir  celui qui nous raconte ses exploits de don juan en sachant qu’il en rajoute ? Doit-on maudire le gamin qui pour sauver sa peau, sort au moment le plus opportun les bons mots, lui permettant d’échapper à la castagne ? Ou la fille laide s’inventant un prince charmant, si charmant et réel, qu’il devient vivant ? Nous avons tous eu recours, j’imagine, un jour ou l’autre et quoi qu’on en dise, au mensonge. Que ce soit pour une bonne ou une moins bonne raison, le mensonge nous a peut-être sauvé la mise, permis d’avancer ou toucher les étoiles, alors que si l’on n’avait pas menti, tout ce bonheur, cette bravoure ou ce contentement n’existerait sans doute pas.

Les menteurs n’ont-ils pas raison, pour autant qu’on parle des plus inoffensifs et des bienheureux, de se pommader de mensonges les protégeant des écueils de la vie comme la crème solaire des rayons du soleil ? Ne choisissent-ils pas la plus pratique des solutions pour supporter la vie ? Même si le mot est fort, combien d’émotifs se disent plus subir et en pâtir que d’être pleinement heureux dans leur existence. Même si le bonheur est une utopie pour les naïfs un tantinet optimistes, selon certains, il n’en reste pas moins, que les menteurs les plus retissant envers cette quête de la félicité n’hésitent pas user de mensonges pour dire s’en approcher.

Le monde dans lequel nous vivons n’est pas tendre, tout le monde le sait et en est conscient, et les menteurs ont un atout majeur pour faire face aux obstacles. Ils savent bien qu’en mentant et se mentant, leur vie pourra se colorer d’une palette de couleurs qu’ils ne pourraient jamais montrer s’ils disaient la vérité. Ah ! La vérité… Pour les menteurs, bien qu’ils admettent volontiers qu’elle soit une qualité et une valeur sûr, ils n’ignorent pas les ravages qu’elle peut faire et peuvent constater autour d’eux, pour ceux la disant, combien leur existence est plus compliquée à leurs yeux. La vérité est rêche, rude et douloureuse à entendre lorsqu’elle se veut souligner les grandes lignes de nos vies. Les menteurs le savent bien, voir toutes ces  vies brisées sous prétexte de dire la vérité les aurait pour leur part, anéanti. Les menteurs peuvent être de grands sentimentaux et de bien fragiles émotifs. Mais ne nous leurrons pas sur ces bienfaiteurs généreux soucieux du bien des leurs, ceux-là ne sont pas des menteurs nuisant mais des fabricants du bonheur. Ouais ! Des fabricants du bonheur… Tandis que pour les menteurs, ceux dont on terra les noms, ceux ne reculant devant rien, ceux n’hésitant pas d’écraser les leurs pour briller un peu plus, ceux-là sont de piètres humains utilisant finalement le mensonge, comme une arme de destruction massive, je puis vous l’assurer pour lavoir vécu. Et je pèse mes mots. Oui, ceux-là ne mesurent pleinement les conséquences de leurs actes que sur leur lit de mort, et encore, alors à vous tous, qui lirez ce texte et y trouverez du sens, n’oubliez pas ceci et que si derrière chaque mensonge il y a des conséquences, derrière chaque vérité il y en a encore plus…

© Didier Leuenberger