LA DIFFERENCE
La différence
Il y a en chacun de nous une singularité qui fait ce que nous sommes. Vouloir l’amenuiser ou la faire disparaître serait bien triste si d’aventure, il nous prenait à penser qu’elle ne nous amène que des problèmes au lieu de nous servir. Qui plus est, lorsqu’on travaille avec des gens que l’on dit différents, la perception de la différence peut s’avérer tout autre de ce que pense la majorité des gens de notre belle et rutilante société.
Pour commencer je pourrais dire ici que nous naissons tous égaux. Bon, c’est une bien belle et grande phrase me direz-vous, juste de surcroît mais qui ne semble pas si respectée qu’il y paraît.
Il est vrai que suivant quel critère l’on évalue ce constat il peut s’avérer qu’il y ait de l’injustice ici et là… Mais parlons de l’humain et que de l’humain. Cette matière noble. Cette matière incroyable s’habillant de tant d’apparats, de tant de couleurs, qu’elle rivalise avec les étoiles les plus enluminées recensées dans le ciel. Une richesse incroyable pour certains, une source éternelle de conflits, de peurs et de craintes les plus diverses pour d’autres.
Qui a raison ? Qui dit la vérité si vérité ? Sans doute les deux, à n’en pas douter. Mais notre intelligence et notre conscience que certains disent plus évoluées que chez nos amis les bêtes, ne devraient-elles donc pas nous permettre d’évincer toutes ces peurs face aux différences ?
Je pense souvent à la manière systématique qu’ont les gens à absolument vous coller une étiquette sur le dos. Ce besoin de catégoriser et peut-être le faites-vous inconsciemment, semble rassurer tout le monde. Tant qu’il n’y a pas cette rassurance plaçant les individus défilant devant nos yeux dans une catégorie, il semble que le malaise persiste. Et pourquoi donc autant de crainte de l’inconnu. Lorsque Christophe Colomb a rencontré les premiers culs-nuls d’Amérique du Sud, pensez-vous qu’il ait émis tant de méfiance à l’égard des sauvages ? Allons donc, et même si la comparaison s’arrêtera là, il les a tout simplement massacrés, ce qui veut dire, et peut-être cela nous représente-t-il bien, que la tolérance zéro était déjà de mise, face à l’inconnu. L’ego démesuré de Monsieur Colomb devait certes, être amplifié par les avancés pyrotechniques dont ils abusèrent contre ces pauvres autochtones. Et il n’en faut pas plus pour écraser son prochain.
Depuis, tout est différent, mai 68 est passé par là, les peace & love nous ont délivrés du mal et désinhibés, nos handicapés ou nos sales mômes sont en institution, on peut être qui l’on veut et de la couleur qu’on veut semble-t-il, sans que cela ne pose de problème, jusqu’au jour du Sida et des ravages qu’il entraina. On trouva très vite des coupables, on mit encore plus vite des limites, des règles et des priorités. La ségrégation se fit aussi aisément qu’une fleur s’ouvre un beau matin d’été. Naturel, oui, comme un instinct de survie, et comme si tout était de la faute des gens que l’on croit ou dit différent. C’est tellement plus facile.
Ma confiance en l’humain se veut limitée, je l’avoue. Un cataclysme, une catastrophe ou un conflit et l’art de dénoncer par des actes délétères d’aucun nom seront très vite monnaie courante. C’est le même cycle depuis toujours. D’abord on adule les poètes avant de les brûler. On fait des prêtresses certaines handicapées avant de les égorger sur l’autel et bien sûr, tout ceci dans le plus élogieux des actes sauvant les valeurs. Les vraies… Sauvant l’humanité d’une contagion sans nom…
Que se passe-t-il donc au cours de nos vies pour qu’à l’âge adulte, nous soyons et devenions si craintifs face à cette différence s’offrant à nos regards. Pourquoi donc la plupart des gens la fuie ou tenteront de la faire entrer dans le moule plutôt que de l’accepter telle qu’elle est ?
Notre éducation est-elle à ce point mal pensée ? Nos us et coutumes, autant ségrégationnistes et censurant ? Que se passe-t-il pour qu’un tel changement de comportement s’effectue ? Quel est le grain de sable déstabilisant soudainement si bien la machine ? Quelles sont les influences ? D’ou nous vient cette méfiance ?
J’ai grandis avec une cousine trisomique, mais jamais à aucun moment l’idée même de penser qu’elle était différente, mis à part sa force que j’imaginai plus provenir d’extra-terrestres qu’une quelconque anormalité, ne m’ont effleuré l’oreille. Jusqu’à ce qu’un jour le mot « mongol » sorte de la bouche de quelqu’un, un adulte bien sûr, avec tout ce que cela comporte de craintes, moquerie et discrimination. Mais avant cela, avant que je ne ressente cette peur dont ces adultes (source de la connaissance, des valeurs et de la justice) tentent de se débarrasser en nous la transmettant, jamais la différence ne m’avait effrayé, bien au contraire. Car ce qui rendait encore plus extraordinaire cette cousine, c’était bel et bien sa différence, en plus de sa personnalité bien trempée. Elle était un rubis dans la nuit, m’attirant, malgré moi. Un joyau qui me permettait de me comparer et de découvrir le vrai monde. Une référence au primaire et surtout, un baromètre de l’hypocrisie, une discipline qu’elle ne connaissait pas mais qu’elle reconnaissait sans mal.
A quelle période de nos vies, inventons-nous ces chimères et deviennent-elles des références ? Comment et par quelle magie font-elles tout imploser en notre for intérieur, y compris notre bon sens ? Notre instinct se veut être limé comme un vulgaire morceau de silex alors que nous nous amusions si bien avec une personne si différente de nous.
A nous tous, adultes soit disant responsables de savoir quelle valeur allons-nous apporter ou accorder à la différence, quelle émotion allons-nous lui allouer, pour que demain nous n’ayons plus à nous demander si l’autre nous ressemble, mais au contraire, quelle est donc ce petit truc lui donnant tant de prestance ; que l’on envie, que l’on admire et qui complètera admirablement bien ce qui nous manquera.
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