T O U S D E S A N G E S

T O U S         D E S          A N G E S

Désemparé

Désemparé

 

Je me sens bien à ses côtés. Empli d’une énergie nouvelle, pourtant je ressens comme un embarras en mon for intérieur. Et j’ai peur de ne pouvoir le dissimuler. Peur que dans mes gestes le plus souvent maladroits, cela ne se voit. Peur que mes mains, toujours au chemin et ne sachant comment et où les mettre, ne dévoilent cette inconstance. J’ai peur que ça ne fasse fuir cet amour auquel je crois tenir.

Faire l’amour me paraît tellement naturel. Tellement plus facile que de lui prendre la main, dehors, ailleurs… Je n’ai aucun tabou, aucune crainte. Je veux juste qu’on ait, l’un et l’autre, du plaisir. Je ferais tout ce qu’on pourrait avoir envie de faire. Alors que pour ces petits gestes, tout me semble tellement plus compliqué.

 

Je me vide de ma substance, tandis que je me remplis d’autre chose. Quelque chose de bien, je le sens. Quelque chose de très bien. Mais au fur et à mesure que je m’emplis de ce bien-être insondable, je ressens une étrange sensation. Je ne peux l’expliquer. Quelque chose qui me pousse à courir. À fuir, fuir cet amour. Ce ne peut être que l’amour dont on a tant envie de s’attacher et d’échapper en même temps ; capable de nous tendre d’aussi beaux pièges.

 

J’ai peur. Peur de le perdre, et pourtant je ne fais rien pour le garder alors que les premiers reproches fusent. Que la jalousie éclate, ce qui me rend encore bien plus sauvage. Je ne supporte pas ces crises et ces reproches. Infondés qui plus est, mais je ne me défends même pas. Je trouve ça tellement absurde. Je suis maladroit, ne sais pas utiliser les bons mots, ne sais pas étreindre lorsqu’il le faudrait. Il me semble devenir de plus en plus froid. Je m’en rends compte, mais je n’arrive pas à réagir. Comme si j’assistais à la mort de quelque chose, impuissant, désarmé. Oui, une petite mort partant dans un abîme inconnu. Celle de notre amour, ou de ce que je pensais être l’amour.

 

Fusent alors les blâmes et les réprobations en mon for intérieur. Je m’auto-sermonne en me fustigeant d’autant m’analyser. Tout est décrypté en moi. Le moindre geste, la moindre émotion, je me traque, me poursuis intérieurement comme un violeur traquerait sa victime.

Je suis sans pitié, dur, intraitable. Je ne me rends pas bien compte qu’aimer, c’est avant tout donner. Donner de soi. Donner. Et je n’ai rien cédé. Rien promis non plus, certes, mais rien légué de moi. De ma vie d’avant, même de celle de maintenant.

 

Je réalise que je n’ai pas véritablement aimé. Aimer vraiment. On me le fait comprendre, on me le fait sentir, en me reprochant ma distance et mon manque de toucher. Ma froideur. Mais je ne sais pas comment faire. Je suis si maladroit, si malhabile, si emprunté. Je suis surtout mal à l’aise. Comment m’y prendre, moi qui n’ai jamais vu ces petits gestes en exemple. Moi, qui les ai tant souhaités, pour ma mère. Comment faire ? Comment léguer ces petits instants de bonheur? Ces petits gestes paraissant si futiles, presque inutiles, alors qu’ils sont les plus importants, apparemment. Desquels on semble tant avoir besoin.

Je sais que faire que lorsque nous sommes au lit, cela semble inscrit dans mes gênes, cela ne me pose aucune question pertinente,  mais dès que nous sommes habillés, dès que nous évoluons dans la vie de tous les jours,  je parais presque handicapé. Je suis un inadapté et cela m’inquiète beaucoup.

 

Alors, on s’agrippe à ma main, que je retire comme si je ressentais une brûlure. Que je laisse glisser et fuir. On frôle mes épaules, mes bras, on tâte mes fesses, exprès. Juste pour voir. Juste pour montrer, mais je suis incapable de répondre d’un petit geste, même le plus anodin, à ces demandes timides pour la plupart, comme s’il était dangereux de trop insister. Comme si je lui faisais peur.

Je m’en veux. Suis impuissant devant ce grand mystère.

 

Je suis désemparé. Désarmé. Je suis… je suis perdu, je l’avoue. Complètement perdu.



15/08/2011
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